Jean-Luc Delarue : famille, cocaïne, cancer... Les secrets douloureux de l'animateur

Jean-Luc Delarue : famille, cocaïne, cancer... Les secrets douloureux de l'animateur Il était le petit prodige de la télévision. Jean-Luc Delarue, mort d'un cancer de l'estomac le 23 août 2012, aura marqué le petit écran par son parcours hors-norme, mais aussi par ses démons, entre traumatismes familiaux, drogue, dérapages et maladie...

Il est mort il y a dix ans jour pour jour. Ce mercredi 24 août 2022, TF1 consacre une soirée entière à Jean-Luc Delarue, animateur et producteur vedette de télévision, mort le 23 août 2012, des suites d'un cancer de l'estomac et du péritoine. "Jean-Luc Delarue, dix ans déjà, de succès en excès", réalisé par Matthieu Valluet et Christophe Janin, prend la forme d'un documentaire proche de l'hommage, avec de nombreuses images d'archive, dont des archives personnelles inédites, mais aussi des confessions sur ce personnage pas comme les autres. Un autre documentaire, "Jean-Luc Delarue, les derniers secrets du roi de la télé", sera diffusé le 1er septembre sur C8.

Producteur à succès, Jean-Luc Delarue était une véritable star du petit écran. Mais loin de son image de "gendre idéal", il cachait des démons qui finiront par le rattraper au faîte de sa gloire. La médiatisation à outrance, la face sombre du show business, comme ses obsessions finiront par lui faire perdre pied. L'ambitieux Jean-Luc Delarue aura en réalité vécu plusieurs vies, une vie publique qui masquait, en privée, un caractère ultra-sensible et torturé.

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Le traumatisme de son enfance

Les deux documentaires promettent de lever le voile sur ce tempérament tourmenté du prince de la télévision. Mais Jean-Luc Delarue lui-même aura pu revenir sur son parcours semé d'embûches dans plusieurs livres, "Dernières confessions", issu d'un entretien avec la journaliste Marie Bernard (Editions du moment, 2012) et surtout une autobiographie rédigée pendant les derniers mois de sa vie et intitulée "Carnets secrets" (L'Archipel, 2012). De son enfance, marquée par les relations difficiles avec ses parents, à son addiction à la cocaïne, sans oublier son rapport à la télévision, l'animateur y aura laissé un témoignage aussi intime que poignant.

Dans ces ouvrages, Jean-Luc Delarue donnera le ton d'entrée : "On m'a souvent présenté comme le gendre idéal. Beaucoup de mamans auraient souhaité me faire partager leur famille, m'avoir comme beau-fils, moi, alors que ma propre mère ne jugeait pas utile de m'inviter aux réunions de famille". Et d'expliquer qu'il "n'étai[t] pas le fils idéal", mais se montrait "colérique, excessif" tout en étant "doué pour dégainer la carte Bleue". "J'ai conservé une lettre envoyée à ma mère que je voudrais que mon fils Jean lise un jour. Cette lettre me résume et éclaire l'homme imparfait que je suis. Elle exprime, je l'espère aussi, ma sincérité", ajoutait-il quelques semaines avant son décès.

Jean-Luc Delarue aura grandi dans une famille où les affrontements étaient monnaie courante et où l'enfant qu'il était se sentait rabaissé. Jean-Claude Delarue, son père, était universitaire, Maryse, sa mère, agrégée d'anglais. Alors que ces derniers étaient accaparés par leurs carrières respectives, Jean-Luc Delarue se serait attaché à sa grand-mère, Renée, pour combler son manque d'affection. Les parents de Jean-Luc Delarue ont divorcé alors que le garçon était âgé de 7 ans.

De son enfance, Jean-Luc Delarue disait qu'il l'avait vécue comme "un simple spectateur". "Je me souviens de beaucoup de bruits, beaucoup d'engueulades entre mes parents qui ne s'entendaient pas du tout", a-t-il confié à Marie Bernard au sujet de sa famille, avec qui il trouvait alors que la "communication rest[ait] difficile". Et celui qui a réussi une carrière hors-normes n'a pas oublié de livrer son sentiment d'infériorité à la journaliste. "Dans ma famille, une grosse blague consistait à dire que mon frère et moi serions tous deux fonctionnaires : lui, président de la République et moi, facteur." L'animateur avait aussi confié que jusqu'à l'âge de 18 ans, il était considéré "comme le débile mental de la famille".

Après la mort de Jean-Luc Delarue, son père Jean-Claude Delarue, en plein conflit d'héritage avec sa veuve, s'était ému d'avoir été tenu à l'écart de l'enterrement, sa mère n'ayant quant à elle pas été conviée aux obsèques. Le père de l'animateur assurait pourtant que les relations entre son fils et lui s'étaient améliorées à la fin de sa vie.

L'alcool, la cocaïne et le travail... Le calvaire de Jean-Luc Delarue

Jean-Luc Delarue avait été contraint de révéler son addiction à la cocaïne en 2010, après que la police avait saisi à son domicile près de 16 grammes de drogue, en septembre la même année. La star en était, de son propre aveu et d'après les témoignages de ses dealers devant la justice, un grand consommateur avec des prises massives (20 grammes de stupéfiants par semaine). Il avait par la suite décrit dans son livre "l'enfer" provoqué par la coke et son existence de "mort-vivant". Et souligné que son arrestation avait été sa "planche de salut" : "Je n'avais plus d'autre issue que la mort".

Les dealers de Jean-Luc Delarue ont reconnu au tribunal que l'animateur était un de leurs clients réguliers. C'est par l'intermédiaire d'une galeriste parisienne que l'animateur se procurait la drogue. Celle-ci a déclaré avoir été contactée souvent par l'homme de télé, qui l'aurait "harcelée" par "des tonnes de messages" dès les premiers échanges. Le chef du réseau, surnommé "Kiks", savait alors qu'il tenait avec Jean-Luc Delarue un client de choix. Il aurait pris l'habitude de récompenser la galeriste d'une commission de 300 euros à chaque fois que la star commandait au moins 20 grammes de drogue.

Celui que ses dealers appelaient "VIP" était un client pressé qu'il fallait faire passer avant tout le monde. En contrepartie, ce dernier payait plus cher que les autres. Selon ses dealers, Jean-Luc Delarue "était toujours pressé" et s'acquittait de 90 euros pour un gramme de cocaïne, alors que les autres acheteurs ne payaient "que" 60 euros pour la même quantité. Les six personnes jugées après le scandale ont écopé de peines allant de 18 mois de prison avec sursis à 5 ans ferme.

Après ces révélations, l'animateur vedette avait décidé de partir en tournée à travers la France, à bord d'un camping-car, pour parler dans les collèges de ses erreurs et partager son expérience avec les plus jeunes. Du récit d'une cuite mémorable avec son grand–père - "A deux, nous avons descendu sept bouteilles" -, aux premiers flirts avec la cocaïne, Jean-Luc Delarue va ainsi longuement aborder tous ses excès. Sans oublier ceux liés à sa boulimie de travail. Un cocktail qui pouvait se révéler explosif.

Jean-Luc Delarue avait en effet été épinglé pour plusieurs dérapages, parfois à l'antenne, comme lors de la cérémonie des Globes de Cristal 2009 diffusée en direct sur France 3. L'animateur avait été contraint de présenter publiquement ses excuses Yamina Benguigui après lui avoir demandé : " Vous voulez que je vous tienne votre globe… ou vos globes ?" en référence à la poitrine de la réalisatrice, à qui il venait de remettre une distinction. Sur RTL, il avait déclaré : "je ne me reconnais pas dans ce qui s'est passé… et je vous présente mes excuses. Cela ne me grandit pas". Le 13 février de la même année, il insultait et tentait de mordre et gifler un des personnels navigants d'un avion en direction de l'Afrique du Sud. Il sera condamné à un stage de citoyenneté de trois jours.

Le cancer de l'estomac, une maladie foudroyante

Jean-Luc Delarue a été foudroyé par un cancer de l'estomac et du péritoine, probablement lié à sa consommation massive de drogue. Le patron de Reservoir Prod avait annoncé publiquement sa maladie lors d'une conférence de presse, le 2 décembre 2011, en entamant sa chimiothérapie. Un véritable couperet survenu un an après le retrait de l'antenne de l'animateur vedette de France 2. La maladie l'avait rapidement contraint à limiter sa tournée de sensibilisation et ses apparitions. 

En juillet 2012, Jean-Luc Delarue ne pouvait pas non plus se présenter à son procès pour acquisition et détention de stupéfiants. Son avocat, Maître Huc-Morel, avait alors invoqué la maladie de son client qui suivait déjà un traitement intensif, ponctué de nombreuses hospitalisations. "Les hospitalisations dont il fait l'objet se succèdent, sont de plus en plus longues et son état de santé actuel le rend aujourd'hui incapable de pouvoir s'expliquer comme il aurait souhaité le faire devant le tribunal". Avant d'ajouter : "Il livre aujourd'hui un combat sans relâche contre le cancer dont il souffre, et il faut admettre que ce combat est difficile". Le procès avait alors été reporté.

La mort de Jean-Luc Delarue

Des photographies volées de Jean-Luc Delarue, prises  à son insu lors de ses vacances avec sa compagne à Belle-Ile-en-Mer, étaient à l'époque été publiées dans la presse à scandale. A seulement 47 ans, l'animateur apparaissait alors affaibli, amaigri, visiblement marqué par la maladie. Loin du "people" encore souriant du début d'année. Le 22 juillet 2012, un canular annoncera la mort de Jean-Luc Delarue sur Twitter.

Jean-Luc Delarue est mort un mois plus tard, le 23 août 2012, à l'hôpital américain de Neuilly, où il avait été transporté la veille après une brusque dégradation de sa santé, liée à son cancer. Des obsèques discrètes seront organisées le 29 août au cimetière du Père Lachaise, à Paris, puis sa dépouille sera transportée au cimetière de Thiais, dans le Val-de-Marne, dans le plus grand secret. Le père de Jean-Luc Delarue laissera entendre que son fils reposait dans un "carré musulman", à la suite d'une conversion tardive à l'islam. L'AFP a depuis précisé que la sépulture de Jean-Luc Delarue se trouve "dans une division du cimetière où sont regroupés des caveaux de familles musulmanes", mais pas réservée aux musulmans. Rapidement, les querelles de famille autour du testament et de l'héritage de Jean-Luc Delarue vont succéder au recueillement.

Anissa Khel et Elisabeth Bost : la guerre des femmes de Jean-Luc Delarue

A la fin de sa vie, Jean-Luc Delarue s'était marié, le 12 mai 2012, à Belle-Ile-en-Mer, avec un ancien mannequin, Anissa Khel. Une femme de plus d'une trentaine d'années au moment de son décès, mais qu'il avait rencontrée plus de trois ans auparavant, avant d'être rattrapé par ses démons. C'est cette jeune femme, diplômée en finances, qui l'aura soutenu pendant ses dernières années, l'aidant à se débarrasser de la cocaïne puis à supporter les séances de chimiothérapie, une fois son cancer connu. Ensemble, ils avaient multiplié les projets, ils avaient notamment créé une ligne de bijoux.

En février 2011, Jean-Luc Delarue déclarait à TV Magazine : "On me demande souvent comment je fais pour me rétablir si vite. Eh bien, c'est en grande partie grâce à Anissa. Nous vivons une très belle histoire d'amour. Et l'amour fait des miracles". "J'ai une femme extraordinaire. On combat ensemble contre le cancer et on n'a plus une seconde à perdre", expliquait-il encore à un magazine people. "Je n'ai jamais été aussi malade et paradoxalement, aussi heureux." Dans Paris Match, Anissa Khel avait aussi décrit sa relation avec Jean-Luc Delarue, de leur rencontre jusqu'aux tensions nées des addictions de l'animateur, qu'elle décrivait comme quelqu'un de "délicat, élégant, cultivé, sensible". "Il est l'homme de ma vie et le sera toujours. Même si c'est curieux de dire cela à 30 ans...".

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Jean-Luc Delarue a aussi partagé la vie de l'animatrice et chroniqueuse Elisabeth Bost, avec qui il a eu un fils, Jean, en 2006. Elisabeth Bost a rencontré Jean-Luc Delarue en 2005 alors qu'elle était stagiaire pour Reservoir Prod. Etudiante au Celsa, elle serait alors tombée immédiatement sous le charme de celui qu'on présentait à l'époque comme "le gendre idéal" du PAF. Dès 2005, celle-ci devient journaliste pour "La Quotidienne" de la chaîne féminine Téva. Elle a aussi travaillé pour M6 et France Télévisions, notamment sur France 2, pour des magazines de divertissement jusqu'en 2010. Dans "Y'a un début à tout" elle se fera connaitre d'une partie du grand public. Au moment du décès de l'animateur, elle était chroniqueuse du "Grand 8", l'émission phare de la chaîne D8.

Jean-Luc Delarue et Elisabeth Bost se seraient séparés en janvier 2009 dans des conditions difficiles. La rupture d'Elisabeth Bost et de Jean-Luc Delarue ne devenait pourtant officielle qu'en mars 2010. Après le décès du puissant producteur, un violent conflit va opposer Elisabeth Bost à Anissa Khel au sujet du testament de Jean-Luc Delarue, qu'elle souhaitait faire annuler. Ce dernier faisait d'Anissa Khel son héritière à 50% avec un riche patrimoine. L'autre partie de la fortune, estimée au total à 22 millions d'euros (avec notamment Reservoir Prod, la société de Jean-Luc Delarue), étant dévolue à son fils. Les déclarations cinglantes à la presse, les tentatives d'intimidation ou d'esbrouffe, les rumeurs et même les cambriolages viendront accompagner le combat juridique des deux femmes, au milieu d'un vaste déballage familial.

Qui était Jean-Luc Delarue ? Biographie express

Jean-Luc Delarue est un présentateur et producteur de télévision vedette des années 1990 et du début des années 2000, connu du grand public pour ses émissions "Ça se discute" et "Toute une histoire". En 1991, après des débuts à la radio, il succède à Michel Denisot sur le plateau de "La Grande Famille", l'émission quotidienne de la mi-journée de  Canal++. Il y reste jusqu'à ses 30 ans, en 1994. Il comparera plus tard Canal+ à "un vrai pays des Enfants gâtés". "Je m'imaginais que le reste du monde était habité par de pauvres types. En réalité, Canal+ était un creuset de prétention et de suffisance, du standard à la direction."

Jean-Luc Delarue arrive sur le service public par la grande porte en présentant l'émission de société "Ça se discute" sur la deuxième chaîne dès 1994. Toujours affublé d'une oreillette, costume et chemise blanche, l'animateur apparaît comme le gendre idéal. Le public suit et son émission est un succès. Elle restera à l'antenne pendant 15 ans sur France 2, jusqu'en 2009.

Durant sa carrière, Jean-Luc Delarue a plusieurs fois été récompensé par un 7 d'or, notamment pour ses émissions "Ça se discute" et "Jour après Jour" en 2001. Fondateur de sa propre boîte de production au moment où il arrive sur France 2, il aura également lancé des programmes très populaires comme "C'est mon choix", "Vis ma vie", "Recherche appartement ou maison", ou encore "Maison à vendre", dont certains, malgré leur côté voyeuriste et quelques foudres du CSA, resteront à l'antenne des années après son décès. Dix ans après sa création, Réservoir Prod employait plus de 250 personnes, avec des filiales et une diversification dans les contenus multimédia dès 2000.

Dès le milieu des années 1990, Jean-Luc Delarue incarne ainsi le nouvel animateur-producteur qui vend à prix d'or ses émissions, notamment au service public. Une polémique éclatera au sujet du montant de ces contrats en 1996, poussant Jean-Pierre Elkabbach à démissionner de son poste de président de France Télévisions. En 2006, Jean-Luc Delarue lance et anime l'émission "Toute une histoire".  Au moment de son arrestation en 2010 pour trafic de cocaïne, France Télévisions arrête sa diffusion. L'émission reprendra par la suite, mais sans lui. Jean-Luc Delarue sera remplacé par Sophie Davant.

Le vendredi 24 août 2012, l'animateur décède des complications d'un cancer de l'estomac à l'âge de 48 ans. Il avait interrompu sa carrière en 2011 pour tenter de combattre cette maladie.

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