1er mai 2024 : d'où vient la fête du travail ? Les origines du jour férié
1ER MAI. La "Fête du Travail" existe depuis le 19e siècle. Le mercredi 1er mai 2024 est ainsi un jour férié, mais également un jour de revendication salariale et syndicale. A l'occasion de la fête du travail, il est fréquent de s'offrir un brin de muguet.
[Mis à jour le 1er mai 2024 à 10h03] Quelle est l'origine de la fête du travail? En 1886, 350 000 employés ont fait grève, aux Etats-Unis, pour demander une journée de travail de 8 heures. S'en sont suivies d'importantes émeutes à Chicago. Depuis, le 1er mai, "moving day" aux Etats-Unis (jour des bilans comptables dans le pays), représente la fête du travail, mais aussi le début du printemps puisque l'on s'offre traditionnellement un brin de muguet qui doit porter bonheur. C'est aussi l'occasion de se mobiliser en participant à des manifestations qui s'organisent dans toute la France.
Concernant la tradition du muguet, elle remonterait à la Rome antique. Les Florales - des fêtes données en l'honneur de la déesse des fleurs Flora - mettaient à l'honneur ces fleurs à clochettes, alors partagées en quantité. Quant aux Celtes, ils célébraient sa floraison avant le début de l'été. Et cette journée est célébrée dans de nombreux pays. Sur le continent nord-américain, certains syndicats et organisations continuent par exemple de commémorer le 1er mai.
Pourquoi le muguet est le symbole du 1er mai ?
Tout a semble-t-il commencé au Moyen Âge, avec l'arrivée de cette fleur japonaise sur le continent européen. Le "lys des vallées", autre petit nom du muguet, symbolise depuis longtemps la saison du printemps. Au fil des époques, la plante a pris une place de plus en plus importante dans l'imaginaire collectif au moment du 1er mai. Et c'est d'ailleurs un 1er mai qu'est véritablement née la tradition bien connue du muguet :
- Selon une légende grecque, le muguet a été créé par le dieu Apollon, qui en recouvrait le sol pour que les pieds de ses muses restent à l'abri. La religion chrétienne associe elle la fleur à la Vierge Marie, dont les larmes au pied de la croix auraient fait pousser les premières fleurs de muguet. Les Celtes et leur tradition nordique considèrent le muguet comme un symbole porte-bonheur du début de l'été. Ils mettent d'ailleurs sur pied des "arbres de mai" pour chasser les mauvais esprits. Bref, plusieurs croyances ou traditions sont depuis très longtemps liées au muguet.
- En France, la tradition du muguet remonterait à la Renaissance. Le 1er mai 1561, le roi Charles IX décide d'officialiser le fait d'offrir chaque année un brin de muguet aux dames composant la cour ce jour-là du calendrier. Le monarque avait lui-même reçu un brin de muguet à cette date comme présent "porte-bonheur", lors d'une visite à la campagne.
- Si les couturiers offraient des brins de muguet à leurs clients le 1er mai au début du 20e siècle, il a fallu attendre l'influence du gouvernement de Vichy du maréchal Pétain pour que le muguet soit associé à la fête du travail en tant que telle, au début des années 40, quand le "jour du muguet" et le "jour du travail" se sont mis à coïncider. Le 24 avril 1941, le maréchal Pétain instaure le 1er mai comme "Fête du travail et de la Concorde sociale".
Comment le 1er mai est devenu la fête du Travail ?
Le 1er mai, Fête du travail, tire ses origines dans l'histoire du monde ouvrier. Le point de départ est le samedi 1er mai 1886. Ce jour-là, à Chicago, un mouvement revendicatif pour la journée de 8 heures est lancé par les syndicats américains, alors en plein développement. Une grève, suivie par 400 000 salariés paralyse de nombreuses usines.
La date du 1er mai n'est pas choisie au hasard : il s'agit du "moving day", le jour où traditionnellement, les entreprises américaines réalisent les calculs de leur année comptable. Le mouvement se poursuit et le 4 mai, lors d'une manifestation, une bombe est jetée sur les policiers qui ripostent. Bilan : une dizaine de morts, dont 7 policiers. S'en suivra la condamnation à mort de cinq anarchistes.
La "journée internationale des travailleurs"
Trois ans plus tard, le congrès de la IIe Internationale socialiste réuni à Paris pour le centenaire de la Révolution française, décide de faire du 1er mai une "journée internationale des travailleurs" avec pour objectif, d'imposer la journée de huit heures. Cette date fut choisie en mémoire du mouvement du 1er mai 1886 de Chicago.
Dès 1890, les manifestants arborent un triangle rouge symbolisant leur triple revendication : 8 heures de travail, 8 heures de sommeil, 8 heures de loisirs. Cette marque est progressivement remplacée par une fleur d'églantine, en 1891, lorsqu'une manifestation à Fourmies, dans le nord de la France dégénère, les forces de l'ordre tirant sur la foule. Ce jour-là, une jeune femme portant une églantine est tuée. Cette fleur devient le symbole du 1er mai (le muguet ne reviendra que plus tard).
Pourquoi le 1er mai est un jour férié ?
Le 1er mai est un jour particulier en France depuis 1919. Tandis qu'aux Etats-Unis la revendication d'une journée de 8 heures au sein du monde du travail a été entendue rapidement suite au mouvement de grève du 1er mai 1886, en France, il a fallu attendre près de 30 ans pour que les ouvriers français soient entendus.
Le 23 avril 1919, le Sénat ratifie la loi instaurant la journée de huit heures. Exceptionnellement, pour célébrer cette avancée, la Haute Assemblée déclare le 1er mai 1919 journée chômée. Dans les années qui suivent, le 1er mai s'impose peu à peu comme un rendez-vous ouvrier, un jour de cortèges.
Les manifestations du 1er mai 1936 marquent durablement l'imaginaire français. La journée se déroule entre les deux tours des élections législatives. Le 3 mai 1936, la coalition des gauches (SFIO, PCF, radicaux et divers gauche) remporte le scrutin : c'est le début de la période de pouvoir du Front Populaire. Présidé par le socialiste Léon Blum, ce gouvernement ne tarde pas à adopter des mesures historiques pour les travailleurs, la semaine de 40 heures, les deux premières semaines de congés payés ou la reconnaissance du droit syndical.
Le rôle du régime de Vichy
C'est le régime de Vichy qui rend officiellement férié le 1er mai. Avec cette mesure, le Maréchal Pétain et son ministre du Travail, René Belin - un ancien membre éminent de l'aile socialiste de la CGT converti à la Révolution nationale - tentent d'obtenir le soutien des ouvriers. Le jour, institué le 24 avril 1941, est nommé : "Fête du Travail et de la Concorde sociale". Une appellation qui souligne la volonté de Vichy d'unir patrons et ouvriers selon un esprit corporatiste et de mettre fin à la lutte des classes.
C'est le régime de Vichy et seulement lui qui, dans l'histoire de France, désignera officiellement le 1er mai comme "fête du Travail". Le terme n'est pas repris ensuite par le gouvernement de la Libération. En avril 1947, le gouvernement issu de la Libération confirme que le 1er mai demeurera un jour férié et payé. Le 1er mai est ainsi reconnu dans la loi 47-778 du 30 avril 1947 et devient officiellement férié dans la loi 48-746 du 29 avril 1948.
La fête du Travail gardera néanmoins son caractère international. Aujourd'hui, elle est célébrée par un jour chômé dans la plupart des pays d'Europe à l'exception notamment de la Suisse et des Pays-Bas. Le 1er mai est aussi fêté en Afrique du Sud, en Amérique Latine, en Russie, au Japon. Au Royaume-Uni, c'est le premier lundi de mai qui est fêté. Aux Etats-Unis, le "Labor Day" est célébré le premier lundi de septembre. Ce jour d'hommage au mouvement ouvrier est né en 1887, à la demande des syndicats, après la tuerie de Chicago. Mais, à la demande du président américain Grover Cleveland, il n'a pas été fixé au 1er mai afin de ne pas rappeler ce moment dramatique.
Quelle est l'origine du 1er mai ?
Avant même l'avènement du monde ouvrier ou la célébration du muguet, le 1er mai était une date de rituels. Pour les Celtes, cette date marquait la fête de Beltaine : elle marquait le passage de la saison sombre à la saison claire, la reprise de la chasse, de la guerre. Cette "renaissance" est liée à Belenos (incarnation en lumière du dieu Lug).
Selon les textes, des druides allumaient des feux, chargés de protéger symboliquement le bétail des épidémies. Cette fête s'opposait donc à Samain - ancêtre de notre Toussaint – qui marquait le retour aux ténèbres. Des traces de ces pratiques subsistent lors de la nuit de Walpurgis, une célébration païenne christianisée : de grands feux étaient allumés en Allemagne, en Suède ou en Europe centrale.
Les esprits sont omniprésents dans ces traditions. En Moselle-est et en Basse-Alsace, on parle de "nuit des sorcières" (Hexennacht, en Platt, le francique lorrain). Les enfants patrouillaient le soir – il y a vingt ans encore – afin de subtiliser tous les objets trouvés dans les jardins pour les regrouper au centre du village, faisant penser à une intervention surnaturelle.
Aujourd'hui, la principale trace de ces célébrations est l'Arbre de mai – le Maibaum - particulièrement présent dans le sud de l'Allemagne. Dans les villages de Bavière, de Souabe ou de Rhénanie, la tradition veut que l'on dresse un mât en bois orné d'une girouette ou de blasons. C'est l'occasion d'organiser des réjouissances arrosées aux sons des fanfares. L'un des attraits de la fête consiste à subtiliser nuitamment l'arbre du village voisin.
Pourquoi le Front national célébrait le 1er mai ?
Le 1er mai est aussi au fil des années devenu une journée de ralliement pour l'extrême droite, souhaitant rendre hommage à Jeanne d'Arc. La fête de Jeanne-d'Arc était classiquement organisée le 8 mai, puisqu'on estime que c'est ce jour-là, en 1429, qu'elle participa à la libération d'Orléans des Anglais. L'Action française, groupuscule royaliste auquel s'adjoindront des éléments d'extrême droite, récupérera l'événement à des fins politique entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe.
La tradition sera reprise par le Front National à la fin des années 1970 et déplacée au 1er mai en 1988. Cette année-là, Jean-Marie Le Pen espère profiter du rassemblement des militants de son parti pour peser sur le second tour de l'élection présidentielle, organisé le 8 mai. Cette modification permettait aussi au parti de se distinguer d'autres groupes d'extrême droite, qui, eux, continuaient d'organiser leur propre marche courant mai.
Aujourd'hui, le Rassemblement national de Marine Le Pen semble avoir abandonné cette tradition. Jean-Marie le Pen continue quant à lui d'aller déposer une gerbe au pied de la statue de Jeanne d'Arc, dans le 1er arrondissement de Paris...