Attentat de la rue des Rosiers : attaque terroriste à Paris en 1982
Le 9 août 1982, dans le quartier du Marais, à Paris, des terroristes prennent pour cible un restaurant juif et font plusieurs morts : c'est l'attentat de la rue des Rosiers.
C'est dans le climat tendu des conflits israélo-palestiniens au Liban que s'inscrit ce massacre. Les terroristes ciblent le quartier juif du Marais et plus spécifiquement un restaurant casher : le Jo Goldenberg, situé rue des Rosiers, à Paris. Ils attaquent le 9 août 1982 en début d'après-midi, armés de grenades et de pistolets-mitrailleurs. On compte six morts et 22 blessés. Les assaillants prennent la fuite sans être interceptés par les forces de l'ordre. Cet attentat attise les tensions et augmente la défiance des Français envers le président François Mitterrand à qui on reproche une politique propalestinienne. Ce dernier promet de lutter contre le terrorisme et une enquête commence. Comme certains témoins se contredisent et que l'attentat est successivement attribué à divers groupes, l'enquête piétine. En 2020, après quarante ans d'errance judiciaire, le Palestinien Abou Zayed, principal suspect dans cette affaire d'attentat antisémite, est incarcéré, dans l'attente de son procès.
Quelles sont les causes de l'attentat de la rue des Rosiers ?
Le conflit israélo-palestinien, qui déchire le Moyen-Orient depuis les années 20, a des répercussions jusqu'en Europe. En effet, le climat est tendu entre les deux communautés. Le sentiment national palestinien grandit encore davantage suite à la défaite cuisante de la guerre des Six Jours en 1967 ; ce sentiment d'injustice fait naître des envies de vengeance et motive certains à perpétrer des attentats antisémites. Le 3 octobre 1980, jour de fête pour les juifs, la synagogue de la rue Copernic, à Paris, est prise pour cible dans un attentat à la bombe. On compte quatre morts et 46 blessés. C'est le premier attentat antisémite en France depuis la fin de la guerre. En 1982, le conflit israélo-palestinien prend un nouveau tournant puisqu'Israël envahit le Liban. Il s'agit de repousser les forces de l'OLP (Organisation de libération de la Palestine) qui bombardaient la Galilée depuis le sud du pays. Même si les Etats-Unis parviennent à obtenir un cessez-le-feu, les tensions s'exacerbent jusqu'à aboutir, en août, à l'attentat de la rue des Rosiers qui aurait été perpétré par des membres du Fatah-Conseil révolutionnaire.
Comment s'est déroulé l'attentat de la rue des Rosiers ?
Le 9 août 1982, le petit groupe de terroristes attaque le restaurant casher "Jo Goldenberg" qui fait l'angle entre la rue des Rosiers et la rue Ferdinand Duval. Ce restaurant, nommé d'après son propriétaire, se situe dans le quartier juif du Marais, à Paris. Il est la cible spécifique de cet attentat antisémite sans qu'on ait pu véritablement déterminer pourquoi. Au moment du drame, il est 13h15, et une cinquantaine de clients sont attablés. Les assaillants (au nombre de 2 ou de 5 selon les témoins) font irruption, vêtus de costumes gris et équipés de sacs noirs qui dissimulent leurs armes. Ils commencent par jeter une première grenade dans le restaurant, ouvrent le feu avec des mitraillettes, lancent une seconde grenade, puis prennent la fuite en continuant de tirer sur la foule, un peu au hasard. Un policier en civil, présent dans le restaurant, tente de riposter, mais Marco Goldenberg, le fils du restaurateur, pensant qu'il s'agit de l'un des terroristes, lui tire dessus et le blesse grièvement.
Qui sont les victimes de l'attentat de la rue des Rosiers ?
Bien que l'attaque n'ait duré que trois minutes, les victimes sont nombreuses : on compte six morts (trois hommes et trois femmes), ainsi que 22 blessés. Il s'agit principalement de clients et d'employés du restaurant. Quelques passants ont également été touchés par les tirs de mitraillette puisque les terroristes ont continué à tirer en s'enfuyant. Comme évoqué plus haut, un policier en civil a également été blessé par Marco Goldenberg. Parmi les victimes, on trouve deux citoyennes américaines.
Comment s'est déroulée l'enquête sur l'attentat de la rue des Rosiers ?
L'enquête qui fait suite à cet attentat est menée par le juge antiterroriste Jean-Louis Bruguière. Elle est particulièrement laborieuse. Les témoins se contredisent et on ne parvient même pas à établir le nombre exact d'assaillants. De plus, l'attentat est d'abord revendiqué au nom d'une organisation anarchocommuniste : Action directe. Celle-ci dément, et les suspicions se dirigent alors vers un groupe palestinien dissident, dirigé par Abou Nidal : le FCR (Fatah-Conseil révolutionnaire). Comme ceux-ci, contrairement à leurs habitudes, ne revendiquent pas l'attentat de la rue des Rosiers, et qu'aucun suspect n'est interpellé, le doute subsiste. Une piste néonazie est même évoquée, avant d'être abandonnée. En 2007, le juge Marc Trévidic prend les rênes de l'enquête et décide de mener des interrogatoires sous X. Ceux-ci incriminent le FCR. En 2015, la France lance des mandats d'arrêt internationaux contre trois principaux suspects : Mouhamad Souhair Al-Abassi, Mahmoud Khader Abed Adra et Abou Zayed. Seul ce dernier est extradé de Norvège en 2020 et placé en détention. En 2023, il est toujours dans l'attente de son procès.
Qu'est-ce que le pacte secret de l'attentat de la rue des rosiers ?
L'article du Parisien du 8 août 2019 rapporte les révélations de l'ancien chef de la Direction de la surveillance du territoire (DST), Yves Bonnet. Il confesse devant la justice l'existence d'un accord secret entre la France et le groupe terroriste Abou Nidal, potentiellement lié à l'attentat de la rue des Rosiers en 1982. Ce pacte oral aurait permis aux membres d'Abou Nidal réfugiés à l'étranger de venir en France sans risque d'être poursuivis en échange de l'engagement de ne pas commettre d'actions violentes. Les responsables de l'attaque au restaurant juif étaient potentiellement des comparses du groupe.
Quelles sont les conséquences de l'attentat de la rue des Rosiers ?
François Mitterrand, très critiqué pour sa politique jugée propalestinienne, est accueilli aux cris de "Mitterrand assassin ! Mitterrand complice !", alors qu'il se déplace pour rendre hommage aux victimes. Pour apaiser les tensions et prouver qu'il prend acte de la violence des faits, il annonce vouloir lutter de façon plus efficace contre le terrorisme, et créer un secrétariat d'Etat à la Sécurité publique. La façade du restaurant Jo Goldenberg est classée monument historique et une plaque commémorative y est apposée. En septembre 1986, une loi contre le terrorisme et les attaques contre la sécurité de l'Etat est promulguée. Elle donne une définition claire de la notion de terrorisme, et expose la procédure selon laquelle les suspects dans ce type d'affaires seront traités (garde à vue étendue à 4 jours, intervention de l'avocat retardée à 72 heures après le début de la garde à vue, perquisitions facilitées, etc.).