Traité de Francfort : la fin de la guerre franco-allemande
Signé le 10 mai 1871, le traité de Francfort met fin à la guerre franco-allemande de 1870. L'une des conditions de ce traité est le rattachement de l'Alsace-Lorraine à l'Empire allemand.
Résumé du traité de Francfort - Le traité de Francfort est un accord signé entre l'Empire allemand et la République française, le 10 mai 1871. Il marque la fin de la guerre franco-allemande, commencée en juillet 1870. Le conflit avait éclaté à la suite d'une manœuvre diplomatique d'Otto von Bismarck, ministre-président de la Prusse. Ce dernier, architecte de l'unification allemande autour du royaume de Prusse, comptait arracher de nouveaux territoires à l'Empire français de Napoléon III. Mal préparée, la France fut vaincue, ce qui entraîna la chute du Second Empire et le début de la Troisième République. L'armistice franco-allemand impose l'élection d'une nouvelle Assemblée nationale. Après la défaite, la jeune République française signe le traité de Francfort. Elle doit céder l'Alsace-Lorraine à l'Empire allemand, qui vient d'être proclamé. Par ailleurs, l'Allemagne exige le versement d'une somme de 5 milliards de francs-or. La France sort humiliée de ce conflit, ce qui alimente pendant un temps l'esprit de revanche contre l'Allemagne.
Quelles sont les causes du traité de Francfort ?
Le traité de Francfort met fin à la guerre franco-prussienne, aussi appelée "guerre de 1870". Ce conflit trouve sa source dans les mouvements nationalistes qui secouent l'Europe au XIXe siècle. Dès le début du siècle, l'Allemagne est sur la voie de l'unification. Dans les années 1860, Otto von Bismarck, ministre-président prussien, souhaite la création d'un nouvel Etat-nation autour du royaume de Prusse. Pour cela, il doit mettre fin à l'influence de l'Autriche au sein de la Confédération germanique. Sachant qu'un conflit se profile entre la Prusse et l'Autriche, Napoléon III, empereur des Français, négocie sa neutralité en échange de certains territoires, mais ses manœuvres échouent. Après la défaite de l'Autriche en 1866, Bismarck piège la France grâce à un imbroglio diplomatique. Outrée par la dépêche d'Ems, la France déclare la guerre à la Prusse (officiellement, la confédération de l'Allemagne du Nord et ses alliés) le 19 juillet 1870. Mal préparée, l'armée française est vaincue. Lors de la victoire prussienne à la bataille de Sedan (septembre 1870), Napoléon III est fait prisonnier. C'est la fin du Second Empire et le début de la Troisième République. Le 28 janvier 1871, la République française signe un armistice qui prévoit l'élection d'une nouvelle Assemblée nationale. Celle-ci est élue le 8 février 1871. Adolphe Thiers, "chef du pouvoir exécutif de la République française", signe le traité préliminaire de paix à Versailles le 26 février, confirmé par le traité de Francfort, le 10 mai.
Qui signe le traité de Francfort en 1871 ?
Le traité de Francfort est signé à Francfort-sur-le-Main (Empire allemand), le 10 mai 1871, par la République française et l'Empire allemand. Les signataires sont Jules Favre, représentant de la France, et Otto von Bismarck, représentant de l'Empire allemand.
Jules Favre (1809-1880) appose son sceau en tant que ministre des Affaires étrangères. Avocat de métier, il est l'un des opposants républicains au Second Empire. Elu député de Paris en 1858, il s'oppose à la guerre contre la Prusse. Lors de la défaite de Sedan, en 1870, il demande la destitution de Napoléon III. Ministre des Affaires étrangères au sein du gouvernement d'Adolphe Thiers, il est chargé de négocier la paix avec l'Allemagne. Piètre diplomate, il se laisse dicter les conditions par Bismarck. Favre signe également le traité préliminaire de paix à Versailles avec le nouvel Empire allemand, le 26 février 1871.
Otto von Bismarck (1815-1898) signe le traité en tant que chancelier impérial d'Allemagne. Issu d'une famille noble, Bismarck abandonne le droit pour se consacrer à l'exploitation des terres familiales. Dans les années 1840, il entre en politique et devient une figure du mouvement conservateur. Député puis diplomate, il travaille à la montée en puissance de la Prusse au détriment de l'Autriche. En 1867, il est nommé chancelier confédéral de la confédération de l'Allemagne du Nord. Alors que la France est en pleine débâcle, il devient chancelier de l'Empire allemand, proclamé à Versailles le 18 janvier 1871.
Quels territoires sont cédés à l'Allemagne par le traité de Francfort ?
Par le traité de Francfort, la France doit céder près de 14 500 km² de territoires à l'Empire allemand :
- en Alsace, les départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin ;
- en Moselle, les arrondissements de Sarreguemines, Metz, Thionville et 11 communes de l'arrondissement de Briey (territoires de la Lorraine) ;
- en Meurthe, les arrondissements de Sarrebourg et Château-Salins ;
- dans les Vosges, les cantons de Saales et Schirmeck.
Le traité prévoit que les habitants de l'Alsace-Lorraine ont la possibilité de conserver la nationalité française. Par la suite, l'Allemagne leur demande de quitter le territoire avant le 1er octobre 1872 s'ils souhaitent rester français. Environ 130 000 habitants choisissent cette option et quittent l'Alsace-Lorraine. Les habitants qui sont restés ne conservent que la nationalité allemande.
La France doit aussi payer 5 milliards de francs-or à l'Allemagne sur trois ans. Jusqu'à ce que cette somme soit entièrement versée, les troupes allemandes occupent 6 départements : les Ardennes, la Marne, la Haute-Marne, les Vosges, la Meuse, la Meurthe-et-Moselle, ainsi que Belfort. La pénalité est entièrement versée dans les délais.
Quelles sont les conséquences du traité de Francfort ?
Pour payer l'indemnité de 5 milliards de francs-or exigée par l'Allemagne, la France doit emprunter de l'argent. Elle lance plusieurs emprunts, dont celui du 15 juillet 1872, ouvert à l'international. Grâce à cet emprunt, l'Etat français récolte 44 milliards de francs. Cela lui permet de respecter l'échéancier imposé par l'Allemagne. En échange, celle-ci évacue ses dernières troupes du territoire français.
La perte de l'Alsace-Lorraine constitue un traumatisme pour les Français. Ces "provinces perdues", qui faisaient en effet partie de la France depuis le XVIIe siècle, sont considérées comme soumises au régime oppressif de l'Empire allemand. L'annexion de l'Alsace-Lorraine fait naître un esprit de revanche en France. Néanmoins, l'idée de récupérer ces territoires perdus disparaît progressivement des discours des hommes politiques. Dans l'opinion publique, le revanchisme persiste grâce à l'instruction publique : les écoliers apprennent que la perte de l'Alsace-Lorraine est une atteinte à l'intégrité de la France. Parallèlement, la francophobie est à l'œuvre de l'autre côté du Rhin. L'esprit de revanche est ranimé à l'aube de la Première Guerre mondiale. Le début du XXe siècle est marqué par la montée du nationalisme et des rivalités entre les puissances européennes. L'idée d'un conflit est combattue par des députés pacifistes comme Jean Jaurès. Ce dernier est assassiné par un nationaliste à la veille de la Première Guerre mondiale. L'Alsace-Lorraine sera récupérée par la France en 1919.
Le traité de Versailles est-il une revanche face à l'humiliation de Francfort ?
Signé le 28 juin 1919, le traité de Versailles marque la fin de la Première Guerre mondiale. Ayant vaincu l'Allemagne avec l'aide de ses alliés, la France souhaite effacer l'humiliation subie lors du traité de Francfort. Tout d'abord, les Français exigent que la signature ait lieu dans la galerie des Glaces du château de Versailles. Cet endroit est symbolique puisque la proclamation de l'Empire allemand y avait eu lieu le 18 janvier 1871. La date du 28 juin est également lourde de sens : 5 ans plus tôt, en 1914, jour pour jour, l'archiduc François-Ferdinand avait été assassiné à Sarajevo.
Les clauses du traité de Versailles sont particulièrement dures pour l'Allemagne, qui doit restituer l'Alsace-Lorraine à la France. Elle perd d'autres territoires au profit de la Pologne, de la Belgique et du Danemark. D'autre part, l'empire colonial allemand est liquidé. La France récupère une partie du Cameroun et du Togo, tandis que d'autres colonies allemandes en Afrique et en Asie passent sous le contrôle des Alliés.
L'Allemagne est également condamnée à verser 132 milliards de marks-or de réparations. Elle doit aussi livrer des marchandises aux Alliés. En proie à de grandes difficultés financières, l'Allemagne a du mal à payer sa dette et à effectuer les livraisons, ce qui mène à l'occupation de la Ruhr par la France et la Belgique de 1923 à 1925. Pour un grand nombre d'Allemands, le traité de Versailles est une humiliation et alimente les discours nationalistes. L'une des obsessions d'Adolf Hitler sera d'ailleurs de faire payer cet affront à la France.