Opération Chammal : bilan, fin, combat contre l'Etat islamique
L'opération Chammal est lancée en 2014 à la demande de l'Irak pour répondre à la menace de l'Etat islamique. Menée par la France en collaboration avec ses alliés, elle s'étend à la Syrie en 2015.
Résumé de l'opération Chammal - L'opération Chammal est une OPEX (opération militaire extérieure) française. Elle débute le 19 septembre 2014 en Irak. Initiée à la demande de Bagdad et menée en collaboration avec les alliés de la France, elle vise à soutenir les forces locales engagées contre l'Etat islamique (Daech). Dans un premier temps, elle se déroule exclusivement en Irak. Face à la menace terroriste en France, le président de la République décide d'étendre l'opération à la Syrie en 2015, avec pour objectif de détruire les camps d'entraînement de l'EI. Plus récemment, l'opération Chammal est devenue une mission de conseil et d'assistance en Irak.
Pourquoi l'opération Chammal a-t-elle été lancée ?
La guerre d'Irak (ou Seconde Guerre du Golfe) commence officiellement le 10 mars 2003 pour s'achever le 18 décembre 2011. La même année, au cours du Printemps arabe, les manifestations pacifiques contre le régime de Bachar el Assad sont durement réprimées : c'est le début de la révolution syrienne.
C'est dans ce contexte qu'émerge l'Etat islamique (EI, aussi appelé Daech), organisation politico-militaire salafiste dijihadiste. Se considérant comme le gouvernement légitime de l'Irak, il s'étend en Syrie et prononce le rétablissement du califat le 19 juin 2014. Dès lors, Daech voit son influence s'étendre à de nombreux pays, et à plusieurs groupes djihadistes tels que le Boko Haram au Nigeria, Ansar Baït al-Maqdis dans le Sinaï égyptien ou le Majlis Choura Chabab al-Islam en Libye.
La coalition internationale en Irak et en Syrie (aussi appelée coalition contre l'Etat islamique ou coalition anti-EI) est formée en 2014. Elle est dirigée par les Etats-Unis et rassemble les principales armées européennes, l'Australie, le Canada, l'Arabie saoudite, la Jordanie, le Qatar, le Bahreïn et les Emirats arabes unis. Les premières frappes interviennent le 8 août 2014 en Irak. Le 15 août 2014, l'ONU adopte la résolution 2170 condamnant les actes terroristes de Daech violant les droits humains, les tueries et massacres sauvages de civils. Le 15 septembre 2014, la conférence internationale de Paris s'engage à fournir une aide militaire à l'Irak pour lutter contre Daech.
L'opération Chammal est lancée le 19 septembre 2014, après que l'Etat islamique ait menacé le Kurdistan iranien. Le terme "Chammal" désigne un vent du nord en Irak. Il s'agit du volet français de l'opération interalliée Inherent Resolve (OIR) qui rassemble plus de 70 nations. Elle intervient à la demande du gouvernement irakien, en coordination avec les alliés de la France dans la région, pour apporter un soutien aux forces engagées contre Daech. L'opération se déroule exclusivement en Irak, car il s'agit de ne pas apporter un soutien au gouvernement de Bachar el-Assad.
Quels sont les objectifs de l'opération Chammal ?
En Irak, cette opération a pour objectif premier l'apport d'un soutien militaire aux forces locales alors engagées dans le combat contre l'Etat islamique sur leur territoire. L'opération Chammal, qui rassemble alors presque 80 pays et pas moins de 5 organisations internationales, repose sur deux piliers :
- La formation au profit des forces de sécurité nationales en Irak.
- L'appui destiné à soutenir les troupes engagées au sol contre Daech.
Le 8 septembre 2015, sur décision de l'actuel président de la République François Hollande, la zone d'intervention de l'OPEX Chammal est étendue à la Syrie en raison de la menace terroriste qui plane sur la France. Le but de la mission est de pouvoir frapper les centres où l'Etat islamique planifie et organise ses futures attaques. Les premières frappes aériennes françaises en Syrie ont lieu le dimanche 27 septembre 2015.
Le 20 novembre 2015, après les attentats du 13 novembre menés simultanément à Saint-Denis et à Paris, les Nations Unies adoptent la résolution 2249 visant à affirmer la détermination de la communauté internationale à combattre la menace des terroristes par tous les moyens possibles.
Quel est le rôle de la France avec l'opération Chammal ?
La France prend d'abord part aux opérations aériennes en Irak, considérant que l'intervention répond à la demande officielle des autorités de Bagdad, et qu'il est exclu de soutenir Bachar el-Assad. A partir de septembre 2015, l'opération Chammal s'étend à la Syrie avec pour objectif de neutraliser les camps d'entraînement de l'Etat islamique. Les relations diplomatiques entre la France et la Syrie sont marquées par de nombreuses tensions récurrentes depuis la crise du canal de Suez en 1956. Elles connaissent des périodes de ruptures, notamment après l'assassinat de Louis Delamare, ambassadeur de France au Liban, le 4 septembre 1981.
Le 7 novembre 1999, Bachar el-Assad, le président de la Syrie, est reçu à l'Elysée par le président Jacques Chirac, ce premier montre toutefois son soutien à la résolution 1559 du Conseil de Sécurité des Nations unies, qui se montre pourtant à l'encontre des intérêts syriens au Liban (2004). Le président syrien est présent à Paris en 2008 pour le lancement de l'Union pour la Méditerranée (UpM) et pour le défilé du 14 juillet, un tournant dans les relations franco-syriennes. Les relations diplomatiques se tendent toutefois lors de la révolution syrienne. La France dénonce les massacres perpétrés par le régime syrien, ce qui se solde, le 29 mai 2012, par l'expulsion de l'ambassadeur de Syrie en France, Lamia Chakkour.
En novembre 2011, Alain Juppé, le ministre des Affaires étrangères français, estime que le président syrien doit être jugé par le Tribunal pénal international. Pour la France, le Conseil national syrien et la coalition sont les "seuls représentants légitimes du peuple syrien". La France accuse le président syrien de crimes contre l'humanité.
Le premier bombardement en Syrie se serait déroulé sur Raqqa le 24 septembre 2015. Il est suivi de plusieurs frappes aériennes, dont un bombardement massif le 15 novembre, en réponse aux attentats du 13 novembre 2015. Cette série d'attaques à Saint-Denis et à Paris constitue l'attentat le plus meurtrier à s'être produit sur le sol français.
Quel est le bilan de l'opération Chammal ?
600 militaires français, 9 Rafale, 6 Mirage 2000 D, un avion de ravitaillement C135-FR et 1 avion de patrouille maritime atlantique sont engagés dans l'opération. Les moyens évoluent au gré des besoins depuis 2014 : la marine nationale a ainsi déployé la frégate Jean-Bart dans le Golfe arabo-persique pendant plusieurs semaines, ainsi que le porte-avions de Charles de Gaulle. En 2016, un soutien d'artillerie s'ajoute aux opérations aériennes et aux missions de formation.
Entre le début de l'opération et le 9 décembre 2017, le bilan de l'intervention est de 1 422 frappes aériennes, 2 209 objectifs détruits et 2 700 bombes larguées, auxquels il faut ajouter 1 587 missions de tirs d'artillerie à partir de septembre 2016.
Le 21 janvier 2016, le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian affirme qu'environ 1 000 djihadistes de l'EI ont été tués par l'aviation française. L'armée française affirme avoir formé 2 500 militaires irakiens de l'ICQS (Iraqi Counter Terrorism Service). Quoique les frappes de la coalition aient fait des victimes civiles, aucune preuve ne permet actuellement d'impliquer la France. Toutefois, l'ONG Airwars, qui fait le décompte des victimes, remet en question la transparence de la France.
L'opération Chammal est-elle terminée ?
Si l'opération Chammal se poursuit à ce jour, elle fait l'objet de critiques. En février 2019, le colonel François-Régis Legrier, commandant du 68e régiment d'artillerie d'Afrique et chef de l'artillerie française pendant l'offensive de Deir ez-Zor entre octobre 2018 et février 2019, dénonce ainsi une opération "poussive" et des "coûts exorbitants" dans un article rapidement censuré.
Depuis le 1er janvier 2022, l'opération Chammal évolue vers une mission de conseil et d'assistance. L'objectif de renforcement de coopération militaire entre la France et l'Irak comporte un volet d'accompagnement des forces armées irakiennes dans le domaine du commandement opérationnel, un volet de formation et un volet aérien, avec des entraînements entre Rafale français et les F16 irakiens.