Traités d'Utrecht : fin de la guerre de succession d'Espagne
Les traités d'Utrecht sont deux traités qui mirent fin à la guerre de succession d'Espagne à leur signature en 1713 entre les royaumes de France, d'Espagne, et de Grande-Bretagne.
Résumé des traités d'Utrecht - Le début du XVIIIe siècle est marqué en Europe par la guerre de succession d'Espagne qui opposa les royaumes de France, d'Espagne, de Grande-Bretagne et des Provinces-Unies. Ce long conflit qui épuisa considérablement les armées belligérantes s'étendit sur douze ans, et déboucha en 1713 sur la signature de deux traités de paix, les traités d'Utrecht. Marquant la fin du conflit en cours, ces traités marquèrent une redistribution des forces sur le continent, consacrant le déclin de l'hégémonie française au profit de la Grande-Bretagne.
Dans quel contexte les traités d'Utrecht ont-ils été signés ?
Les deux traités d'Utrecht mettent fin en 1713 à la guerre de succession au trône d'Espagne, qui déchirait l'Europe depuis 1700. La mort du roi Charles II, de la dynastie autrichienne des Habsbourg, laissa son royaume sans descendance directe. Alors que le duc d'Anjou, petit-fils de Louis XIV, revendique la couronne, sa succession est contestée par l'Autriche tandis que la Grande-Bretagne et les Provinces-Unies du Nord entendent remettre en question l'hégémonie naissante du royaume de France. Ces dernières déclarent la guerre à Louis XIV le 13 mai 1702. Le conflit durera douze ans, et sera en grande partie réglé par la signature de la "Paix d'Utrecht". Le premier traité de paix est signé le 11 avril 1713 entre la France et la Grande-Bretagne, et le second le 13 juillet de la même année entre l'Espagne et la Grande-Bretagne. Sans consacrer de vainqueur, ces traités actent un rééquilibrage de la domination politique européenne au profit des royaumes autrichien et surtout britannique. Ils constituent aux yeux des historiens un des actes de naissance de la diplomatie moderne.
Que constituent exactement les traités d'Utrecht ?
Les traités d'Utrecht correspondent à deux traités distincts, du fait principalement des puissances qui les signent avec la Grande-Bretagne : le premier traité du 11 avril étant signé par la France et le deuxième du 13 juillet par l'Espagne. Ces traités rédigés en français mettent fin à la guerre de succession d'Espagne, qui ne sera cependant effective qu'avec le traité de Rastatt du 6 mars 1714. Principale conséquence politique, Philippe V, petit-fils de Louis XIV, est consacré roi d'Espagne, mais ce dernier doit alors renoncer à ses droits à la couronne de France. En contrepartie, la Grande-Bretagne obtient de la France qu'elle reconnaisse la légitimité de la reine Anne et de la lignée protestante en renonçant à son soutien à la ligne jacobine. De nombreuses possessions territoriales sont redistribuées entre les belligérants, principalement au profit de la Grande-Bretagne et au détriment de l'Espagne. Les traités d'Utrecht promeuvent dans l'ensemble une logique d'équilibre des puissances européennes, qui restera néanmoins précaire.
Que retirent les puissances belligérantes des traités d'Utrecht ?
- L'Espagne est la grande perdante des traités d'Utrecht. Elle se voit confisquer toutes ses possessions européennes : ses territoires italiens de Milan et la Sicile sont réattribués au duché de Savoie tandis que Naples, la Sardaigne, mais aussi les Pays-Bas méridionaux (l'actuelle Belgique) sont donnés à l'Autriche. Même son territoire est en partie amputé, Gibraltar et Minorque passant sous domination britannique.
- La France voit de son côté une partie de son influence sur le territoire européen décliner. Le rêve de Louis XIV de réunir les couronnes française et espagnole est anéanti par la Paix d'Utrecht. La France doit aussi restituer d'importantes colonies comme la baie d'Hudson, Terre-Neuve et l'Acadie, cruciales pour les traversées vers l'Amérique, à la Grande-Bretagne. Mais en contrepartie, les frontières du royaume de France restent les mêmes qu'au début du conflit en 1700.
- Les Provinces-Unies font partie du camp des "gagnants" des traités d'Utrecht, mais leurs gains sont marginaux, au point que leur influence en Europe en ressort déclinante. Bien qu'ils organisent sur leur territoire les négociations des traités, ils n'obtiennent que des garnisons dans huit places fortes le long de la frontière avec la France. Ils récupèrent Tournai, Menin ou Ypres, mais doivent céder Lille et Béthune à l'Hexagone. Cette période débouche sur un endettement du royaume dont profitera grandement la Grande-Bretagne.
- La Grande-Bretagne sort grande triomphatrice des traités d'Utrecht, qui amorcent l'ascension politique du royaume. Surtout, elle affirme sa domination stratégique et commerciale sur les mers jusque-là partagées avec les Provinces-Unies, mais aussi sur les routes navales vers l'Amérique.
Comment ces deux traités de paix permettent-ils à la langue française de rayonner ?
Si la France ressort politiquement diminuée de la guerre de succession d'Espagne, les traités d'Utrecht sont en revanche une victoire pour le rayonnement culturel du pays, un des grands chantiers du règne de Louis XIV. Au moment où les négociations de paix sont entamées entre les principaux belligérants, la France reste sur plusieurs victoires qui permettent de reprendre l'initiative stratégique dans le conflit. Le 24 juillet 1712, l'armée française commandée par le maréchal de Villars décroche une victoire inespérée lors de la bataille de Denain contre la coalition autrichienne et hollandaise. La couronne française parvient à négocier des conditions plus favorables lors du Congrès d'Utrecht, qui se tient depuis le mois de janvier. Elle obtient notamment que les traités soient rédigés en français, une première à l'échelle européenne depuis le règne d'Henri II au XVIe siècle. Ces traités marquent le début de la tradition de la primauté de la langue française dans les traités diplomatiques, qui durera deux siècles. Cette domination sera effective jusqu'au Traité de Versailles de 1919. Ce dernier rétablit l'anglais comme seconde langue officielle sous l'impulsion du Royaume-Uni et des Etats-Unis. De quoi conduire à la création de la Société des Nations, précurseur de l'ONU, par le président américain Woodrow Wilson.