Edit de Fontainebleau : révocation de l'édit de Nantes, 1685
L'édit de Fontainebleau est un texte signé en 1685 par Louis XIV. Connu sous le nom de "révocation de l'édit de Nantes", il vise à unifier le royaume de France et à lutter contre le culte protestant.
Résumé de l'édit de Fontainebleau - Le XVIe siècle en France avait été marqué par des guerres de religion entre protestants et catholiques. L'édit de Nantes de 1598, signé par le roi Henri IV, avait permis d'atténuer les tensions entre les différents cultes et de restaurer un semblant de paix civile. L'arrivée au pouvoir de Louis XIV en 1643 marque néanmoins un tournant avec l'instauration de la monarchie absolue, résumée par cette célèbre phrase : "une foi, une loi, un roi". Voulant lutter contre les particularismes et unifier le royaume, Louis XIV signe en 1685 l'édit de Fontainebleau révoquant l'édit de Nantes qui octroyait la liberté de culte aux protestants. Ce texte a notamment conduit à l'exil près de 200 000 protestants, parmi lesquels de nombreux intellectuels et penseurs français, et a accru les persécutions.
Quelles sont les origines de l'édit de Fontainebleau ?
Entre 1562 et 1598, une guerre civile fait rage entre protestants et catholiques : ce sont les guerres de religion. En effet, le XVIe siècle a été ensanglanté par des destructions d'une violence inédite pour l'époque, comme le massacre de la Saint-Barthélemy. Cette période a entraîné de nombreux traumatismes. Soucieux d'assurer la paix dans son royaume et de lutter plus efficacement contre les guerres extérieures, Henri IV signe l'édit de Nantes qui consacre un semblant d'apaisement entre les deux religions en 1598. Mais les privilèges obtenues par les protestants vont provoquer la prise d'indépendance de certaines places fortes et leur rébellion. Louis XIII et ses conseillers se refusent à voir certaines villes du royaume acquérir autant de pouvoir et de nouveaux combats sont engagés. A la suite du siège de La Rochelle et de la reddition de la ville, dernier bastion séparatiste des protestants, la paix d'Alès est conclue en 1628. Les protestants perdent l'ensemble de leurs places de sûreté à cette occasion, mais la tolérance concernant le culte protestant est maintenue.
Pourquoi Louis XIV s'en prend aux protestants ?
Le début du règne de Louis XIV est ponctué par des séparatismes intempestifs. Le roi est ainsi profondément marqué par la Fronde des nobles qui a contraint sa famille et lui-même, encore enfant, à fuir le Louvre, symbole de la monarchie depuis près d'un millénaire. Louis XIV choisit donc l'autoritarisme dès son accession au trône, et ce pour garantir la sécurité intérieure du royaume. Il met en place l'absolutisme ("L'Etat, c'est moi") qui régit l'unité du royaume par ses lois et sa foi. En tant que catholique éduqué dès l'enfance par les jésuites qui forgèrent en lui un fort sentiment antiprotestant, Louis XIV organise progressivement la conversion forcée des protestants et fait peser sur eux de plus en plus de contraintes. Ces contraintes sont parachevées en 1685 avec la signature de l'édit de Fontainebleau révoquant l'édit de Nantes.
Comment la religion protestante est-elle persécutée en France ?
Déjà avant la signature de l'édit de Fontainebleau, Louis XIV met en œuvre des démarches légales et institutionnelles visant à persécuter les protestants refusant de se convertir au catholicisme. Cela se manifeste par une série de mesures antiprotestantes : incitation des citoyens à dénoncer leurs voisins protestants, interdiction pour les protestants d'exercer certains métiers, destruction des temples ou remplacement de ces derniers par des églises, condamnation des mariages mixtes, etc. Enfin, certains meneurs protestants sont enlevés et torturés pour les contraindre à se convertir.
L'organisation de dragonnades forçant les protestants à se convertir en masse reste la mesure la plus emblématique de cette période. Les persécutions sont organisées par des dragons : des soldats qui combattent à pied, mais se déplacent à cheval. Le principe des dragonnades repose sur l'intimidation. Les soldats se logent chez les protestants jusqu'à ce qu'ils abjurent leur foi. Ils usent ainsi d'un moyen de pression financier tout autant que de menaces. Les dragonnades vont se multiplier après 1685 et la signature de l'édit de Fontainebleau.
Quel est le but de l'édit de Fontainebleau ?
L'édit de Fontainebleau s'inscrit dans une démarche d'unification du pays autour d'un monarque et d'une même religion. Le texte est partiellement rédigé par le chancelier Le Tellier avec l'approbation du roi, et est signé en 1685 à Fontainebleau par Louis XIV. Il révoque ainsi l'édit de Nantes et interdit officiellement le culte protestant, qui ne représente que 1 % de la population française environ. L'objectif est donc pour Louis XIV d'éradiquer définitivement ce culte et d'assurer la primauté du catholicisme dans le royaume. Le lieu de Fontainebleau est hautement symbolique : c'est en effet là qu'est né le père de Louis XIV, mais c'est également le lieu où Henri IV, auteur de l'édit de Nantes, a passé une grande partie de sa vie.
Que contient le texte de l'édit de Fontainebleau ?
L'édit de Fontainebleau est une série de douze articles de loi affirmant l'interdiction du culte protestant et les dispositions légales visant à éradiquer le protestantisme désormais considéré comme une hérésie. L'article I évoque explicitement la révocation de l'édit de Nantes : avons par ce présent édit perpétuel et irrévocable, supprimé et révoqué, supprimons et révoquons, l'édit du Roi notre dit aïeul, donné à Nantes au mois d'avril 1598. Le texte propose ensuite aux protestants de se convertir au catholicisme, le baptême des enfants devient obligatoire et les écoles protestantes sont interdites. Il se conclut par l'article XII, et l'exigence pour les protestants de ne point […] s'assembler sous prétexte de prières ou de culte de ladite religion de quelque nature qu'il soit, sous les peines […] de confiscation de corps et de biens. Le texte complet est accessible sur le site de la BNF en cliquant sur l'image ci-dessous :
Quelles sont les conséquences de l'édit de Fontainebleau pour les protestants ?
La proclamation de l'édit de Fontainebleau va conduire à l'exil près de 200 000 huguenots (protestants français) qui rejoindront des pays plus au nord comme la Suède, la Belgique ou encore la Hollande. De nombreux convertis ont une pratique très superficielle du catholicisme, et continuent clandestinement à organiser des cultes protestants. Malgré cela, les persécutions se poursuivent et génèrent, en 1702 dans les Cévennes, une insurrection de protestants, qui sera violemment réprimée. Les dragonnades continuent, et les derniers temples sont détruits.
Quelles sont les conséquences politiques de l'édit de Fontainebleau ?
Si l'édit de Fontainebleau est apprécié par les catholiques français, il l'est moins aux yeux de Rome et du Vatican qui espérait une réunification des branches catholiques et protestantes. Du point de vue diplomatique, les tensions entre la papauté et la France vont ainsi s'exacerber. La France perd également de nombreux intellectuels et ingénieurs, ralentissant temporairement les progrès technologiques français, notamment dans l'armement, suite à l'exode des protestants. De même, Guillaume d'Orange, roi d'Angleterre et protestant, voit d'un mauvais œil cet édit, et opère différents blocus commerciaux.
dates clés de l'Edit de Fontainebleau
- 13 avril 1598 - Signature de l'édit de Nantes
- La seconde moitié du XVIe siècle est ensanglantée par les guerres de Religion qui nuisent à l'unité de la France face aux menaces des puissances étrangères. Le roi Henri IV, protestant converti au catholicisme, se sent personnellement touché par les massacres commis à l'endroit des huguenots. Le 13 avril 1598, il signe l'édit de Nantes avec l'espoir de mettre un terme aux violences qui opposent catholiques et protestants. Dans ce texte, il accorde la liberté de culte aux protestants, et autorise la création de nouveaux temples. Malgré tout, le texte ne sera jamais véritablement appliqué par ses successeurs, qui continueront de persécuter plus ou moins violemment les huguenots.
- 28 juin 1629 - Paix d'Alès
- La ville portuaire de La Rochelle, dernier bastion du protestantisme en France, proclame son indépendance en 1621 et fait commerce avec l'Angleterre, pays ennemi du royaume. Elle emporte avec elle la ville d'Alès, qui proclame à son tour son indépendance. Cette provocation envers le royaume oblige Louis XIII et son ministre le cardinal Mazarin à réprimer ce séparatisme. En 1627, le ministre du roi organise le siège de La Rochelle qui durera plus d'un an, visant à affamer la ville et à conduire à la reddition des huguenots. Alès est également assiégée, et les derniers insurgés sont violemment réprimés. A la suite de cette confrontation, le 28 juin 1629, la paix d'Alès est signée. Ce traité de paix réduit considérablement la liberté des huguenots, mais la paix civile est assurée.
- 18 octobre 1685 - Louis XIV révoque l'édit de Nantes
- Le 18 octobre 1685, à la suite de plusieurs insurrections et dans la continuité du règne absolu de Louis XIV, l'édit de Nantes est révoqué. L'édit de Fontainebleau met un terme au texte signé par Henri IV en 1598, signant la fin de la liberté de culte des protestants, et employant toutes les armes institutionnelles pour lutter contre un culte désormais considéré comme "hérétique". Il oblige ainsi les huguenots à se convertir sous peine d'exil ou de persécution. Près de 200 000 protestants quittent alors la France, privant le royaume de nombreux intellectuels et réduisant temporairement sa prospérité économique.